Et Serra engendra Turrell
Je l'imagine tomber, sans aucune raison mais je suis là. Je vois le début de la chute inexorable vers le sol.
Je le photographie ou la dessine ou la peint. Ce bloc d'acier, cette sculpture au milieu de la place, ce menhir moderne,
géométrique, en plein contre-jour. Mais n'ai-je pas le temps de tourner ma tête pour changer de feuille ou
de toile ou recharger mon appareil photo que je ne vois pas mais entends le vacarme créé par le contact de
la stèle sur le sol. Il a percé le toit d'un parking ou détruit le Velux d'une maison mais a fait sauter les plombs.
Je réussis à m'introduire à l'intérieur de l'édifice troué, je vois alors le trou béant qui laisse passer cette douche
de lumière. La poussière créée par l'impact vole, saturant l'air, la respiration et la vue. Il y a alors du grain sur mon dessin
ou du crachat sur ma peinture ou la poussière volatile apparaît sur ma photographie. Je n'ai pas réussi à avoir l'instant précis
du choc, seulement l'avant et l'après.
Le bloc créa la lumière, Serra engendra Turrell.
Un groupe de personnes qui se réunissent un jeudi sur deux pour écrire
Qui êtes-vous ?
- Claude Lothier
- Perspectiviste acharné depuis 1995 /unremitting perspectivist