Un groupe de personnes qui se réunissent un jeudi sur deux pour écrire

lundi 23 octobre 2017

Venette Saint-Félix en reine de la neige d'après un fragment de Bruegel

       Comme tous les hivers, dès la première neige, je me suis hissée sur ce que j’aime appeler mon trône hivernal comme pour dominer cette étendue blanche et vierge de présence humaine.
D’ici j’observe, je regarde, je perçois et je vois. Tout et rien à la fois. Le toit des maisons piétiné par les oiseaux devient aussi captivant que le ploiement des branches sous le poids de la neige. Un rien paraît alors évident. Tout ce qui d’ordinaire se déroule en pleine saison estivale semble s’arrêter et vouloir demeurer éternel en hiver.
Mes pieds de reine s’enfoncent dans le tapis immaculé et moi seule peux inaugurer ce plancher glacé.

       Et comme pour me rattraper, la réalité me gifle à coups venteux. 


samedi 21 octobre 2017

Quentin Saint-Pierre rétablit la vérité sur un anachronisme commis par le Vieux Bruegel des Chasseurs dans la neige

Hiver 96, un des plus grands évènements sportifs de l'année se prépare : LES CHAMPIONNATS DU MONDE DE CURLING SUR GAZON.
Après la performance de Peter RAKICH, le Croate, lors des jeux olympiques d'hiver de Kaboul l'année précédente, le championnat s'annonçait chaud bouillant. Même si cette fois-ci la compétition se déroulait à Bourg-saint-Maurice, petite bourgade des Alpes françaises, on décide, avec mon cousin, de prendre la 103 bleu clair édition spéciale Quicksilver de son père pour rallier la petite station de ski, laissant derrière nous notre vie de parisiens.
A 83km/h grand max' sur les belles autoroutes françaises, on se traîne, la finale est dans seulement 17h. Au Bout de 4h, on fait notre première pause à la station TOTAL du kilomètre 312. Il faut se bouger on a pas pris nos 2 jours de RTT et raté les lancers de galets les plus impressionnants de la décennie. Bon ... rien à foutre des recommandations du garagiste,  on rempli le réservoir de sans plomb 95. A croire qu'on a bien fait, la charrette est boostée, on rallie Bourg-saint-Maurice en à peine 6h, un exploit ; plus rapide qu'Eddy Merckx au mont Ventoux.
Sur place, du monde à perte de vue, des drapeaux de tous les pays s'agitent sur du Whitney Houston. On ne tient plus en place, c'est encore plus beau que ce qu'on avait pu imaginer. On laisse la voiture au parking pour allez se noyer dans la foule. Tout le monde crie, tout le monde chante,  on a laissé les connards à Paris et ON PROFITE.
Soudain, une serveuse nous interpelle, c'est Marie, une fan de cricket que j'avais rencontrée sur le tour de France. Elle nous offre une pinte de Pelforth Blonde et un bol de Bretzels. Je commence à avoir un bon pressentiment sur ces 2 jours à la montagne.
Bière après bière, on en oublie presque la compétition et pourquoi on est là. Une annonce au micro nous ramène vite à la réalité : "15-3 EQUIPE ROUGE! ET HOT DOG MOITIE PRIX PENDANT 20 MINUTES!"
On se précipite alors, fendant la foule pour gagner le stade. Sur la pelouse principale se trouvent les 2 plus grandes équipes du monde, on ne peut pas rater ça.
Entre deux épaules je commence à entrevoir le stade, je continue à jouer des coudes pour avancer. On arrive devant la porte, on avale les escaliers et on se retrouve alors face à ce spectacle incroyable qu'est le curling sur gazon. La foule en liesse scande le nom des athlètes. Je suis subjugué par ce panoramique dont j'ai rêvé toute ma vie, ça y est, j'y suis.
Une brute me bouscule violemment dans le dos et me renverse tout ses nachos dessus. Je me retourne pour lui exprimer mon mécontentement, il me répond d'un crochet du gauche qui me plonge dans un coma profond.

Je n'ai jamais connu le résultat final de ce match.

La famille de Camille Jollain aime jouer dans la neige peinte par le Vieux Bruegel

Souvenir d'hiver.

C'était en plein hiver, un hiver froid. Les arbres n'avaient plus de feuilles depuis
maintenant deux mois et demi et il avait neigé toute la nuit. Nous étions tous
sortis après ce long repas pour profiter de cet après-midi ensoleillé. Mes
cousins et mes cousines couraient et jouaient dans la neige ! Mes oncles
faisaient une partie de croquet et mes tantes discutaient à côté du puits. Je
pris ma sœur par le bras et nous partîmes toutes les deux à l'aventure dans
cet immense espace blanc. Nous aimions marcher pendant des heures, sans
savoir vraiment où nous allions. Arrivées, sur la montagne surplombant le
village, nous nous assîmes sur des rochers. Plus bas dans la colline, nous les
vîmes s'amuser ! Nous restions là pendant un moment à les observer. Mes
cousins se couraient derrière, Thomas le plus grand fit tomber son frère Matis.
Il lui tendit la main et le remit sur pied. C'était reparti ! Ils passèrent à vive
allure près des filles qui jouaient avec la neige. Lorsque nous vîmes notre
grand-père sortir de la grande maison, nous nous regardâmes et descendîmes

à toute allure la colline. Nous entendions le clocher sonner 17h, nous étions sur
la colline depuis maintenant deux heures.

Tiziano Foucault-Gini si sente lontano del frammento dei Cacciatori nelle neve del vecchio Bruegel

Je me suis inscrit à l'atelier écriture, le seul problème c'est que je ne peux pas y participer physiquement, j'ai donc conclu un marché avec Claudio, il m'envoie le sujet et moi j'écris de mon côté. 

J'ai reçu son mail lundi à 19h23, j'ai découvert, à grand plaisir, la consigne rédigée en italien, elle était accompagnée d'un détail d'un tableau hollandais de Bruegel l'ancien je crois. J'ai pas bien saisi la consigne de prime abord,  il me semble je devais écrire un texte en pensant, en me focalisant sur le fait que je connaissais les personnes, le lieu, en somme tout ce qui était représenté à l'image, comme si je l'avais vécu, comme si j'y étais allé... J'ai donc pensé à plusieurs scénarios, un homme qui se réveillait dans un paysage enseveli sous la neige après une bringue compliquée, ou un type désespéré qui se faisait interner dans un goulag soviétique, ou nord coréen, bref rien de bien excitant. Mais il y avait un problème, cette image me paraissait figée dans le temps, elle ne correspondait pas à mon époque, il y avait un anachronisme qui me perturbait, j'ai par conséquent baissé les bras. Et puis j'ai relu le mail, je me suis arrêté sur cette dernière phrase : "Si scrive esattamente cosa si vuole."  C'est-à-dire, on écrit exactement ce que l'on veut. Et moi, ce que je voulais, c'était écrire exactement où j'en suis, là, maintenant. 

Il est 12h24,

Bonne soirée.

Anastasiia Kondratieva, depuis son Ukraine, chasse un souvenir à partir d'un fragment des Chasseurs dans la neige de Bruegel l'ancien


 Maison !? 
C’est le premier mot qui sonne dans ma tête au moment où je ne vois que le ciel gris et les collines couvertes de neige. Je connais parfaitement ce paysage. Maintenant si lointain, mais à jamais si cher à mon cœur. 
Je me sens de nouveau divisée en deux, sensation qui pique à l’intérieur, qui interroge mon être. Je le fuyais de toutes mes forces il y a encore un certain temps (me paraissant dorénavant une éternité), mais à cet instant je sens (pour encore combien de temps ?) l’avoir enfin apprivoisé. 
C’est cette neige que je ne vois plus maintenant, en habitant dans un autre monde, qui me rappelle soudainement ma nature. La honte ou la fierté ? Ma force ou ma faiblesse ? 
C’est cette neige que je voyais parfois dans cet autre monde, qui me rappelle cette violente force avec laquelle l’on m’a chassée de cet endroit magique : un autre monde me permettant de revenir pour quelques inoubliables instants dans mes origines. L’angoisse ou l’audace ? 
Qui suis-je donc à cet instant ? 
En baissant mes yeux, je souris. Il est tellement ironique de contempler Les chasseurs dans la neige tout en me sentant chassée. C’est en étant chassée de partout, me sentant depuis une « éternité » venue de nulle part, que j’ai enfin trouvé ma place. 

Ne pas chercher la neige, ou en être nostalgique, ne pas permettre aux souvenirs de me diviser. Garder cette neige en moi. Etre la neige. 

Nikita Fauveau évoque un souvenir brûlant à partir d'un fragment des Chasseurs dans la neige de Bruegel l'ancien





je...
je ne sais plus trop.
je me souviens
je le sais
je me souviens
je le sais que je me souviens
mais, fin, je ne sais plus trop.
je me souviens
du jaune
ou,
du rouge aussi
oui, c'était rouge
tu sais, je sais que ça a existé
ce moment
je le sais
et toi t'étais là,
tu bougeais devant
y'avait les couleurs qui changeaient
mais
j'sais pas
je ne me souviens plus
plus exactement
je me souviens du froid
ça, ça, je m'en souviens
de mes pieds
mes pieds
je sais pas
mais je crois
que mes pieds me faisaient mal
je m'en souviens
je me souviens
mais 
je sais plus
il faisait chaud oui
et derrière, il faisait froid
ça tirait
ça me tirait, le froid
ça me tirait derrière
il faisait froid derrière moi
et lui, ça chauffait, je sais pas
ça, ça brûlait dans mes pieds
ça brûlait 
ça je le sais
fin peut-être pas
peut-être pas vraiment
mais, ça brûlait de froid
et, dans mes yeux
ça brûlait aussi
ça brûlait de chaud
je regardais
je regardais devant là
et toi, et toi t'étais la
à côté
je le sais que t'étais là
ça je m'en souviens que t'étais là
comme je le sais que j'y étais
j'étais là, et je regardais
t'étais là, et tu travaillais
tu bougeais, tu partais, tu revenais, tu portais des, des, des trucs
des trucs grands, des trucs, fin je sais pas quoi là
tu portais des trucs
et moi
je restais la, devant, je bougeais pas, je restais là
comme tu me disais
de rester là
de rester tranquille
alors j'étais tranquille
là, à côté de toi
et devant
devant ça brûlait
ça je m'en souviens de ça
de la brûlure
fin, pas une brûlure
mais ça brûlait
ça, je m'en souviens
mais 
je disais rien
non je disais rien
ça brûlait
ça brûlait de chaud
ça brûlait de froid
mais
ça brûlait pas non
enfin ça faisait pas mal non
ça faisait pas mal
c'était
je sais pas
*soupir*
je sais plus.
Je le sais
je le sais que je me souviens
mais bon
voila, c'est… je me rappelle
que ça faisait pas mal
j'étais là
et je te regardais
et je vous regardais
et devant
dans mes yeux
c'était jaune
c'é
 tait rouge
et je le sais
qu'on était là
toi à côté
et moi devant
et le froid derrière
et le froid en l'air
le froid partout
autour 
partout
c'était ça
il faisait froid
ça je le sais
qu'il faisait froid
mais pourtant
devant
il faisait pas
il faisait pas froid
non
c'était ça
devant,
ça brûlait.

Pourquoi ?

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Perspectiviste acharné depuis 1995 /unremitting perspectivist