Un groupe de personnes qui se réunissent un jeudi sur deux pour écrire

lundi 28 janvier 2013

Pauline Rey


Quand les objets parlent, comment faites-vous pour dormir?

Parfois, quand je me relève, la nuit, je ne comprends pas pourquoi tout à l'air si différent alors que rien n'a changé. Les objets n'attendent que l'obscurité pour s'animer.
Ainsi, la nuit, le plafonnier se balance au rythme du réveil qui en profite pour suspendre ses secondes dans les airs, petites notes éparses qui s'échappent et ponctuent le silence. 
Serrés les uns contre les autres sur l'étagère, les livres s'échangent des mots et réinventent les histoires qu'ils connaissent par coeur. Ils se racontent pendant que l'étagère, impassible et muette, supporte leurs enfantillages et les remettra en place lorsque commencera à pointer le jour.
Devant la fenêtre, les rideaux, légers, ondulent leur voile que le vent chatouille de son souffle discret.
Par terre, le tapis aimerait en faire autant, mais il est trop lourd. Lentement, il rampe sur le parquet grinçant, millimètre par millimètre, en rêvant un jour de pouvoir voler de ses propres ailes. 
La lampe de chevet s'amuse à agiter le fil qui la relie à la prise électrique. Je cherche à tâtons l'interrupteur qui n'est pas à la même place lorsque je décide d'allumer la lumière. 
Je me lève et, face à moi, le miroir me laisse voir la pièce en arrière où les objets semblent retenir leur respiration, dans l'espoir de retrouver enfin leur liberté.


dimanche 27 janvier 2013

Bryan Peltier


Depuis ce matin, un mot est resté coincé dans ma tête : DYNAMITE.  
Comme un mot du jour.  
Quatre syllabes de deux lettres.  
Quatre consonnes pour quatre voyelles.  
C’est un mot qui est revenu par secousses durant la journée. Cela pourrait faire peur de 
penser à de la dynamite, mais cet engouement pour ce mot, cette vitalité dans la lecture de 
ce propos me rappellent l’inconscience de la jeunesse, l’envie et la volonté des premières fois. 
Je me raccroche à ce mot en but d’en faire une bd explosive, de témoigner de nos actes 
parfois instinctifs mais si importants dans le tournant de nos vies. 
DYNAMITE résonne comme un objet si dangereux que l’on ne pense qu’à ses dégâts. Peut- 
il y avoir un aspect positif dans la DYNAMITE ?  
Lorsque je pense au mot DYNAMITE, je pense à ce quelque chose d’explosif à l’intérieur de 
soi, la motivation inattendue qui surgit d’un coup.  
Ce côté incontrôlable de la DYNAMITE m’intéresse, d’avoir en tête et en main une idée, une 
envie si puissante que l’on ne sait quoi en faire avant qu’elle perde sa puissance. La 
détonation correspondrait à l’attente de l’idée, comme la course à la réussite et du mieux.  
Tank Girl est cette bd de Jamie Hewlett, étudiant de l'université de Nothbrook (Angleterre) 
dont le graphisme et les références musicales débordent de ce livre qui bouscule l'académisme 
de la bd traditionnelle. Cette Punkette armée de sa poitrine comme des rockets 
révolutionnent ce snobisme de par cette bd underground. 

La DYNAMITE, je n’en ai jamais réellement vu, sauf dans les westerns et dans les films 
d’action où les méchants braquent les banques et attaquent la loi par des prises d’otages.  
Je suis un peu le coyote maladroit avec sa DYNAMITE couleur brique, accompagné d’un 
minuteur de cuisine.  
DYNAMITE sonne comme DYNAMO et MITE ou DINAR et HERMAPHRODITE. 
Cela pourrait être un prénom pour une fille aussi. 
Que ferait-elle DYNAMITE ? Jeune file hyperactive qui se retrouve dans des situations 
improbables et dont les lecteurs seraient envieux. Ou contraire, jeune femme ayant eu de 
graves difficultés d’intégration et qui, un jour, quitte sa profession de gérante de rayon en 
superette.  

On ne juge pas la DYNAMITE pour sa beauté.  
Voilà pourquoi DYNAMITE est un prénom adéquat pour une fille actuelle. 

samedi 26 janvier 2013

Benoît Villemont


Parfois il m'arrive, curieux de la bonne intention, de me coucher trop tôt et de m'ennuyer de m'endormir.

Je ne suis plus debout, les pieds sur la Terre, mais bien allongé, et l'horizon se trouve à la verticale. C'est un autre monde. Là, j'essaye de communiquer avec la Lune autant qu'avec marchand de sable, mais rien à faire. Je crois qu'ils ne m'entendent pas. C'est sûrement à cause de ces gens qui crient et grognent dehors, encore dans la fête à la sortie de la discothèque. J'aimerais passer ma voix par le velux et leur dire comme ils ne se rendent pas compte du fait qu'ils parlent plus fort que moi si bien qu'ils bloquent le dialogue entre moi, la Lune et le marchand.

Mais à bien y réfléchir, ces gens-là n'appartiennent pas à mon monde où toutes les routes mènent aux étoiles, alors pourquoi les entendrais-je ? Celui qui crie, qui grogne, c'est peut-être le velux lui-même, juste au-dessus de mon ventre. J'aimerais bien vérifier, seulement la nuit a ce côté sournois qui fait qu'elle se tait lorsqu'on croit toucher la vérité.

Et dans le silence, la nuit devient doute.

Quels sont donc ces bruits, aussi fins que les étoiles, qui apparaissent et disparaissent aussitôt ? Une chaise qui grince ? Une feuille qui est tombée ? J'écoute. Quel est donc ce souffle qui s’intensifie à vitesse humaine ? Le silence ne respire pas, le noir non plus, alors qui est-ce ? Mon étagère ? Il y a quelque-chose chez moi, et dans le silence, son ombre devient frayeur.

Si j'ai peur, jamais je ne m'endormirai.
Alors mieux vaut penser que

dans cet horizon vertical,

le voleur qui est chez moi n'est rien d'autre que le marchand.

Guidé par la Lune, il range chaque objet de mon appartement,

autant que chaque pensée de ma tête, pour les protéger de son sable

et les préparer au rêve.

Les objets bavards de Denis Drouet


Quand les objets parlent comment faites-vous pour dormir ?
Depuis peu, j'ai compris qu'inviter des amis à dormir à la maison était vraisemblablement une mauvaise
idée ! Sans vouloir sembler antipathique, plus de la moitié des personnes à qui vous proposez de dormir
chez vous répondront NON.
Alors, bien sûr il y a divers degrés de Non ; certains s’évertueront à vous expliquer en toute amitié qu'ils
préfèrent dormir chez eux, car ils ont leur chat à nourrir, car ils ronflent ou bien encore ils ne veulent pas
nous importuner.
« Non, c'est gentil mec mais sérieusement je ne veux pas t'importuner ! »
D'autres s’imagineront que s'ils viennent dormir à la maison, il risquerait de se passer des choses « pas
très catholiques » entre nous.
Des amis un peu bourrés, se prenant pour Superman, pensent généralement que leur maison est juste à
l'autre bout de la rue. Bien évidemment je ne vous cache pas que l'alcool n'est pas le meilleur conseiller,
Bref …
Vos amis diront Non, et ils ont raison, parce que les pires amis c'est ceux qui disent Oui.
Vous connaissez certainement vous aussi les « squateurum d'apartementum » ! Une espèce de moins en
moins rare dans nos villes appelés plus communément les squat-man. Ces énergumènes sont comme des
sangsues sympathiques qui vous accompagnent, vous préchauffent le matelas, vous laissent les restes de leur
petit déjeuner et vous obligent à inviter votre copine entre midi et demi et midi trois quart parce que
c'est le seul moment ou ils sortent pour fumer leur clope.
Rebref …
Le pire du pire c'est mon appart.
En admettant que vous tombiez sur un ami sympa, qui dit oui ce con, et qu'en plus il ne vous demande
pas avec des yeux de pikachu :
« heu ça te dérange si je reste ici jusqu’à ce que je me trouve un nouvel appart ? »
Nan, le pire c'est mon appart, si je vous invite à dormir vous pouvez être sûr que vous ne dormirez pas.
Ou bien que d'un oeil.
Je vous proposerais le lit d'ami, que j’aurais préalablement disposé près de la tuyauterie de ma salle de
bain, afin qu'il étouffe légèrement le ramdam insupportable, surtout pour les novices du sommeil. Ces
tuyaux sont tellement bavards que dès lors qu'ils stoppent leur raffut, vous appréhendez déjà leur retour.
Et quand enfin ils se seront tus, vous continuerez à entendre l'exécrable symphonie dans votre tête. Un
mélange de Beethoven jouant d'une brouette rouillée et d'indiens d’Amérique séquestrés dans des tout
petits tuyaux rouges.
Vous entendrez sûrement, le déclencheur électrique du lampadaire situé derrière la tête de lit qui toutes
les 5 minutes 27 nous démontre que lui aussi a son mot à dire. D'un tac si brusque que l'on a la
sensation de recevoir un électrochoc.
Même la tapisserie est criarde ! Parée d'une teinte vermillon et de ses motifs animaliers, elle est si
présente que dès que vos yeux commencent à se fermer, les animaux semblent danser la samba et
s'approcher lentement de votre oreiller où ils trouveront une personne à perturber.
Et puis j'ai récemment entendu de nouveaux voisins plutôt silencieux, une bande de rats qui s'amusent
à dévaler la pente de mon plafond sous combles, et qui agitent leurs petites griffes sur le placo-plâtre
semblant chaque nuit de plus en plus fin.
Alors si ce soir je vous proposais de dormir à la maison que répondriez-vous ?




jeudi 24 janvier 2013

En lisant une page d'Orhan Pamuk

D'autres couleurs, Folio Gallimard n° 5194

mardi 15 janvier 2013

CAPUT INTER NUBILA




Dans l'obscurité de la nuit, ses pensées s'égrainent, s'étiolent, 
se dissolvent dans l'épaisseur du silence.
CAPUT INTER NUBILA
Il rêve. 
Allongé sur son lit, il sent ses membres s'engourdir, se dérober à lui-même. 
Son corps s'efface. Il flotte entre deux mondes. 
Des images lui viennent en tête, incertaines, floues. 
Elles prennent peu à peu forme et les songes envahissent son esprit. 
Il se voit, assis sur un nuage porté par les vents.
APERTO LIBRO
Survolant sa vie, se confrontant à ses peurs, à ses fantasmes, 
il tente de s'étreindre. 
Il est en suspens, coincé entre deux rives, un fantôme errant dans sa propre vie. 
Il aimerait être quelqu'un d'autre mais il sait que cette entreprise est vaine.
CAELUM NON ANIMUM MUTANT QUI TRANS MARE CURRUNT

Pauline Rey

lundi 14 janvier 2013

Laure Sabler


Ab abrupto Magister dixit Autobi passenbant completi. 
Je répondis alors, De omnibus dubitandum, moi je voulais dire les omnibus sont dubitatifs.  
Une voix s'éleva intra muros pour crier mais alors pas que les omnibus.
Je me souviens que le Master reponditi, si j'en ai pas perdu mon latin, Amici Annus perditi.
Et un cœur lui fit écho, Alea Jacta est.
Et j'ajoutais Barba non facit Magister.
J'ai retenu in extremis de ces heures c'est que Alpha et omega, j'avais Caput inter nubila.
Bien sur ex nihilo nihili fit. Et je suis sur que vous direz que c'est Incredibile dictu que le Magister ne connaissait le Latin que grosso modo
J'ai donc traversé cette classe Nolens volens sur la place le plus longtemps sub sole sans que ne soit réveillée ma libido sciendi au sujet de cette matière, mais où j'ai compris l'expression ad nauseam
A posteriori j'ai passé des Annos mirabilis que ad Iterim et ad multos annos Caelum non animum mutant qui trans mare crurunt
C'est donc la première fois depuis le jour où je suis rentrée dans cette classe que j'écris un texte avec autant de Latin.  

Avec des locutions latines


XIII Aprilis XXIII ap-JC
Lettre à ma descendance
Dorian Drouet.

Cher petit filleul,
Ex abrupto, J'encre la page pour laisser une trace du secret qui anime notre famille.
Si tu es bien mon descendant, la tradition veut que tes initiales soient les mêmes que les miennes et que celles de mes pères. Ex ungue leonem !
Il a de cela septante années, mon vieux père Darius Drouet, qui à l'époque était un valeureux guerrier des campagnes de l'Ouest de la Gaulle, fut envoyé pour espionner l'ennemi Romain Julius César.
A cette époque nous vivions, lui, ma mère Hélène de Durtal et moi-même dans la résidence familiale près de Vindinum. Où la source de notre secret rayonne toujours intra muros, je l'espère.
Je disais donc, mon vieux père s'en allant espionner, avait réussi à infiltrer la garde Romaine. De ce poste il livrait adversus periculum naturalis ratio permittit se defendere des messages de manière à contrecarrer les projets de julius le rouge. Passons les détails d'histoire familiale.
Darius, qui était des mieux battit a in extremis ad nauseam rejoint nos contrées avec ce secret pour lequel j'écris.
In naturalibus je livre le lieu des desiderata de César subtilisé par mon père lors d'une guerre contre Vercingétorix notre chef à tous. Tu trouveras incredibile dictu ad genius loci un verre d'une valeur inestimable, un verre qui donne une jeunesse ad vitaem eternam. Il a pour nom « le Graal ». Si tu le retrouves dans les fondations de notre sûrement déjà très vieille bâtisse familiale, tu pourras grâce à lui ad animi lux caelestis et par chance retrouver ma trace parmi ce monde qui est mon futur, ton présent.
Alea jacta est, j'espère que tu le retrouveras.

Ad multos annos !

  

  

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Perspectiviste acharné depuis 1995 /unremitting perspectivist