Un groupe de personnes qui se réunissent un jeudi sur deux pour écrire

vendredi 28 décembre 2007

Alexandrins

C'est en comptant encor qu'on écrivit jeudi
Il fallait compter juste et s'arrêter à douze
Comme toujours à la fin chacun lut son papier
certains tout étonnés de tomber sur leurs pieds.

Claude Lothier

"Si tous les gars du monde voulaient s'donner la main"
Tous les jeudis matins je prends le TGV
Oui mais la s'maine prochaine je ne le prendrai pas
Depuis quelques semaines on circule en tramway
C'est plus rapide qu'à pied et puis c'est abrité
J'ai ach'té un ticket pour faire dix traversées
Je conseille à tout l'monde d'aller bien explorer
La ligne sur tout son long, de l'université
Où très émerveillé j'ai fait la découverte
D'une belle bibliothèque accessible à tout l'monde
Rien que d'en faire le tour on écarquille les yeux
Il y a des puits de lumière, de splendides espaces
L'architecte est poète, il dessine ses volumes
En perspectives faussées tout en grand angulaire
Il habite Nancy et c'est lui qui refit
Le musée de Matisse au Cateau-Cambrésis
Et aussi le musée des Beaux-Arts de Nancy
Tout au sud de la ville (je reviens au tramway)
On débarque en campagne, enfin pas tout à fait
Il y a là Antarès, c'est une soucoupe volante
On n'est pas loin non plus du circuit des autos
Où chaque année en juin viennent ronfler des bolides
C'est très assourdissant du moins je l'imagine
Ce que j'aime en tramway c'est qu'on glisse sur les rails
Mais on voit moins la ville à travers ses fenêtres
Qui pourtant sont très grandes, on prend l'air ennuyé
On prend l'air habitué on fait semblant de rien
Comme si depuis toujours sans nulle interruption
On avait circulé en traction électrique
Alors qu'il y a longtemps on avait tout cassé
Du premier des tramways, celui de 1900
Qui transporta gaiement toute la populace
Au-dessus de la Sarthe et ce joli croisement
Détruit en 45 à cause des allemands
Je regrette le fer de ses poutres en dentelle
Un peu comme celles qu'on voit au carrefour des Minimes
Pont en X lit-on sur les cartes postales
Qui marquèrent l'époque et nous font rêver d'elle
Comme le dit Calvino c'est fait pour ça les cartes
Bien contents du progrès on dit la larme à l'oeil
Comme c'était mieux avant et puis on téléphone
On envoie des e-mails on va vite à Paris
"Oui mais dans l'monde entier c'est pas partout Paris"
Savez-vous qu'à Brûlon naquit monsieur Claude Chappe ?
C'est son buste à la poste qu'on voit sur le fronton
Vous pourrez lire son nom et penser télégraphe
Une invention très belle qui naguère rapprocha
Les contrées séparées par des dizaines de lieues
Des bras articulés transmettaient des signaux
Qu'il fallait décoder au moyen d'un gros livre
Le petit personnel lui n'y comprenait rien
Seul le chef à casquette accédait aux secrets
Qui traversaient la France et sauvaient les élites.

Shan Huang

Nous pouvons voir la terre depuis l'univers
Il y a une conception en forme de cœur
C'est un petit village qui est sur la terre
Il est à la longitude 20 degrés
Sa latitude est 20 degrés aussi
Il y a une maison pas loin de la mer
un joli tapis déposé dans une chambre
Il y a des lunettes sur ce tapis jaune
Un pied de ces lunettes noires est cassé
Une table basse où se trouve ce pied
Sur cette table, il y a un verre plein
Un cafard est mort dans ce verre de lait pourri
Deux phrases de mon texte sont gommées

Myriam Thuault

Les alexandrins


- Je pleure du sable et je raconte des histoires.

- Il me faut du temps pour le dire en quelques mots.

- Je danse sur un arrosoir et je souffle du thé.

- J'écoute un stylo et je recule de trois lits.

- Tu penses en bâtonnets Igloo et chantes la vie.

- Tu n'es plus le même depuis que tu as changé.

- Au petit bac la grenade compte pour trois genres.

- Les Laboratoires Garnier nous disent: "prends soin d'toi".

- Le petit bonhomme en mousse qui s'élance et qui...

- Si maman si, si maman si, maman si tu...

- Patrick G porte un beau maillot de corps bleu gris.

- David racle sa gorge en état de réflexion.

- Paula arrive en retard pour la douzième fois.

- J'aimerais savoir ce que Simon B rédige.

- je porte une tunique à tendance Brancusienne.

- Shan tapote des mots pour trouver des mots semblables

- Je ne sais plus son prénom mais elle écrit, wahhouuuu!

- Louise porte une broche tout près de son cou pour Paris.

- Claude apprécie l'écriture au stylo triple mine.

- Je range mes idées dans des boîtes en osier rose.

- Mon Reynolds meurt entre mes doigts noircis de lui.

- La page vierge de ce cahier me donne envie...

- Il dit que la vie c'est comme une boîte de choco.

- Les pères Noël sont verts et je mange des brioches.

Louise Devin

Alexandrine


Elle est partie fâchée, sans le moindre regret
Comment une fille peut plaire sans avoir l'air vulgaire
Peut être est-ce possible mais pas pour Damasine
Dès le soleil levé elle se met à jouer
De pinceaux et de plumes, la pauvre est ridicule
Fardée du bout du nez jusqu'en haut des sourcils
Elle met du rouge baiser et ses lèvres en fourmillent
Elle prend alors son peigne et attaque la tignasse
Pour faire d'un sac de nœuds la plus belle des blondasses
Reste pour s'accomplir de choisir sa parure
Et c'est sans oublier de trouver les chaussures
« Talons ou escarpins ?», se demande la belle
Oh comme la vie est dure, pourquoi tant de dilemmes
« Et mince le ciel est bleu, j'avais mis mes yeux verts »
Cria-t-elle aux Grands Dieux avec un air amer
Se pourra-t-il un jour avec une chance rare
Que son environnement la soutienne sans égard

Pauline Abbadie

A la table du Louisiana sirotai-je

lorgnant le défilé du délicieux cortège

sous mes yeux de terrassier en place de mirer

le doux laid face à la vitrine de l'épicier,

Madame la propriétaire, sac sorti,

pour sa mensuelle guérison à la pharmacie.

Parait-il qu'elle serait tombée de tout son sus...;

encore aurait-il fallu que je le susse!

Monsieur Pic et sa cuisse de canard du midi

"à la graisse d'oie que je la cuis", qu'il me dit.

L'air étonné pris-je pour ne pas le vexer,

tous les jours me dit-il ça devant mon perrier.

La table d'à côté déjà sort ses huîtres

rien que pour un énième blanc d'Alsace. Fichtre!

Le mollusque flasque tombe face à la gueule du chien,

il n'imagine pas sa proche nausée; le vaurien.

De pis en pis devient Madame Rizière

de sa peur du trottoir, elle y laisse son derrière

rasant les murs d'un lèche vitrine forcé

narguant la chute jusqu'à la cabane du boucher.

Douces pensées citadines d'un verre solitaire

Rose Mansion

Alexandrins

Et voilà plus d’une heure que mon regard est fixe.
Fixé sur cette feuille qui reste blanche et lisse.
Ici et là des taches mais pas l’ombre d’un mot.
Mordillant mon crayon, je cherche le début.
Butant sur chaque son, car aucun ne convient.
Vient ensuite l’impatience et soudain la colère.
Errant loin du papier mon regard lui, s’échappe.
Happé par la lumière qui transperce le verre.
Ergot bien insolent, fuyant toute contrainte
Intimidant le vide, l‘impatience l’anime.
Immolant mon ennui, elle appelle la rime.
Immédiate et bien brusque, elle réveille ma main.
Maintenant qui s’agite et noirCit le papier.
Piétinant de leur verve le plan immaculé.
Les crachats de carbone conquièrent le monde plat
Placé sur mon bureau, maintenant lieu fécond,
Conspirant avec moi pour atteindre Aragon.
Gonflés de notre orgueil nous tomberons de haut.
Obligés de nous rendre, à l’évidence certaine.
Enumérant les fautes qui nous séparent du maître.
Etripant mon papier couvert de hiéroplyphes
(If c’est le nom de l’arbre qui lança ce manège)
Je maudis Aragon d’être né le premier.
Miettes de son talent, ce serait déjà ça.
Saloperie de temps, elles se sont effacées.
C’était inévitable, d’autres après sont passés,
Servant plus ou moins bien, ces restes réchauffés.
Fétichisme à l’envers je jette mon brouillon.
Ions négatifs bien sÜr, il paraît que ça aide,
A calmer les cheveux qu’on ne peut pas lisser.
Cette brève parenthèse est maintenant fermée.
Médisant sur mon compte, j’espère que tout de même
Mémoire vous garderez, du reste mais pas de ça.
Sacrée inspiration, qui nous fausse compagnie.
Nidifiant loin de nous, soudain bien ridicules,
Hululant écarlates, des âneries sans âmes.
Amis, compatriotes, compagnons d’écriture,
Turin c’est une ville que nous visiterons,
Ronronnants de plaisir, écarquillant les yeux.
Zyeuter n’est pas français, veuillez me pardonner.
Mais nul mot n’a l’audace de commencer par lui,
Yeux, ce mot embarrassant, dont j’ai pu me défaire,
Aiguisant bien ma plume en quatre petits vers.
Versifier est un art qui demande du temps.
Tant et tant, presque autant que de l’inspiration.
Scions les viles chaînes qui la tiennent loin de nous.
Nourrissons d’encre noire, l’ivoire mat vide et sec.
Sectionnons le banal, à coup d’alexandrins.

Simon Breton

On peu dire tout ce qu'on veut alors je dis rien

Rien + rien = rien, ça fait trois fois rien

Chanter tout bas « Alexandrie, Alexandra »

Fou et froid comme un faux sosie de Claude François

Ce qui s'en va ne revient pas toujours dans l'air

J'en connais l'air comme une chanson populaire

Dans un polaire endroit et la radio me rend bête

J'ai droit qu'à une glaire pour la skyroulette

J'enrage, j'ô désespoire et je baisse le volume

Lorsque dans le glacial soir, que la vapeur fume

J'suis d'une humeur à préférer le kilo d'plume

Nom de plume : chromosome X, nom de code : légume

Mais les faux voyageurs sont ceux-là qui reviennent

Les beaux-rêves vivent au creux de ce qu'ils retiennent

Partez donc pour nous, nous, nous resterons pour vous

Réservoir de souvenir familiers et doux

J'épelle : ESSI, double D, A, AIRTé, ACHA

Bonheur du portefeuille sur le télé-achat

Je lèche la vitrine de ce qui ne s'achète pas

la peur du méchant loup se cache dans l'oeil du chat

(pas celui qu'on chassa d'Iran mais l'animal)

Celui de la mamie que la chimio manie mal

L'épistolaire amour est une posture timbrée

Tel un pistolet qui crache contre un dos cambré

Braqué par un faux-frère qu'a une gueule d'atmosphère

J'ai même pas de quoi être fier de mes poches sous les paupières

je demeurerai longtemps derrière une bonne bière

J'ai eu la poisse hier, j'ai zappé la prière.

HUIT

NEUF

DIX-SEPT

ONZE

DOUZE

TREIZE

QUATORZE

QUINZE

SEIZE

DIX-SEPT

DIX-HUIT

DIX-NEUF

VINGT

lundi 10 décembre 2007

Comptes inspirés

Les textes élaborés le jeudi 6 décembre prennent l'allure de répliques de théâtre qui s'emballeraient selon le principe suivant : la première ligne compte un mot, le deuxième deux, la troisième trois et ainsi de suite jusqu'au nombre désiré à partir duquel s'ensuivra le déclin régulier du débit jusqu'à se terminer par l'unique mot de la fin.
La procédure est inspirée de la "Boule de neige" oulipienne.
Le contenu est absolument libre.

Justin Delareux

Un,
Plus deux,
Fois sept mille
huit croit, sans neuf
Dit dix, crois trois et
on "The" qui fond les, là
Sept chiffre sans titre sans rites plus
sans voir nie quatre, or ceux si seul
suivent le chiffre sept; pré-sept du cinq sous
Envole et pille le nombre de l'ombre, douze verres tuent
100 verts, tu espères plaire de jeu sans S
Trente deux, mi lion, mi tigre, vinaigre aigre
Report de, et des êtres sans mots
Si à six du laid bleu
Sans cesse dit neuf cuites
mais pas trop quatre
et crois trois
deux sans
un.
VERSION HEIN.eux
un
plus deux
fois sept mies
huit croissant tout neuf
Dis dix, crois toi et
On sait qui font les, là
ce chiffre sans titre sans rite plus
cent loires ni quatres, or ceux si seul
suivent le pitre Septh; présept si du cinq sous
Envole et pille le nombre de l'ombre, douze verts tuent
Sans vertu, tue espère paire de jeux sans aise
Trempe deux mi lion, mi tigre, vinaigre aigre
rapporte deux, et des êtres sans maux
Si assidulé du lait six bleu
sans cesse dix leurs cuites
mais pas trop tard
Et crois toi
sans eux
hein...
VERSION VERS
Un
un deux
un deux trois
un deux trois quatre
un deux trois quatre cinq
un deux trois quatre cinq six
Si deux très quatre cinq si seth
Sept si cinq quatre trois de hein Oui
Huit y croit mes deux si medicis
Sept aussi six car âte les
Seins que toi sais si Qui attrait le deux
Toi qui crois
ça la
main.

Simon Breton

Elle :
Merde !
Moi :
Quoi encore ?
Elle :
Rien du tout.
Moi :
Pourquoi tu dis « merde » ?
Elle :
Parce que j'en ai marre.
Moi :
Mais t'en as marre de quoi ?
Elle :
J'en ai marre de tes questions pourries.
Moi :
Quoi ? Mais c'est toi qui as dit « merde ».
Elle :
C'est ça oui ! Ça va être de ma faute !
Moi :
J'ai pas dit ça, c'est juste que t'as dit « merde ».
Elle :
D'abord je dis « merde » si j'en ai envie, me saoule pas.
Moi :
J'te saoule pas mais je vois pas où tu veux en v'nir.
Elle :
En tout cas, c'est pas avec des alexandrins tirés par les cheveux que ...
Moi :
Si tu continues de compter les pieds quand je parle, je vais te sonnet !
Elle :
Ha ! Des menaces, je te préviens, joue pas à ce petit jeu là avec moi.
Moi :
Je ne joue pas, sinon ce serait déjà reparti comme en 14, crois-moi.
Elle :
Je te crois, je sais comment tu es quand tu es 13 énervé.
Moi :
Ouais, bah des comme toi on en trouve treize à la douzaine.
Elle :
Tu te crois malin ? En plus t'es coiffé comme un bonze.
Moi :
Tu disais pas ça quand tu voulais mon appendice.
Elle :
Espèce de salaud ! Va te faire cuire un 9.
Moi :
Impossible, la bouteille de gaz a une fuite.
Elle :
Très marrant ! 7 fois tu la fermes !
Moi :
Merde, tu me casses le coccyx.
Elle :
D'accord, reçu 5 sur 5.
Moi :
Le débat est clos.
Elle :
Mais au fait !
Moi :
Quoi encore ?
Elle :
Merde !

Chut !
J'dis rien.
Eh bien continue.
D'accord, si tu veux.
Tu veux te faire gauler ?
Evidemment que non, tu crois quoi ?
Alors, ferme-la et puis c'est tout.
Mais c'est toi qui fais que de parler !
Je parle pour te dire de te taire, crétin !
Bon, maintenant c'est fait, alors on se tait.
C'est c'que j'me tue à te dire.
Alors tais-toi et moi aussi.
C'est ça oui, toi aussi.
Mais ferme-la, putain !
Je la ferme.
Bien, parfait.
Parfait.

Claude Lothier

1 - Alors ?
2 - Qui, moi ?
3 - Toi ou lui.
4 - Parce que c'est pareil ?
5 - Il m'arrive de vous confondre.
6 - C'est gentil, après tout ce temps !
7 - Ne vous fâchez pas on rigolera ensemble.
8 - Et quand est-ce que ça se passera ?
9 - Vers Noël ou bien à Pâques, enfin très bientôt.
10 - Et le programme on pourra en discuter ensemble un jour ?
11 - Rome Milan Turin Monaco Cannes Nice Vence Antibes Biot Marseille Aix
12 - Ça promet d'être encore très épuisant jamais de confort pour dormir convenablement.
13 - Réfléchissez un peu un voyage à ce tarif-là c'est véritablement complètement imbattable.
14 - On aura le droit de manger dans le car ou seulement sur les aires ?
15 - En Italie vous choisirez des tramezzini, c'est joli, c'est triangulaire et en plus c'est propre.
16 - On m'a dit qu'à Turin c'est tous les soirs apéritif gratuit à volonté dans les cafés.
17 - Les italiens aiment manger chanter boire s'amuser parler siroter flirter folâtrer raconter des histoires de peinture.
18 - Je vois, vous nous promettez-là un séjour épatant, on reviendra éreintés épuisés anéantis pour retourner à l'usine.
19 - N'oubliez pas que vos cerveaux se seront enrichis et vos muscles endurcis pour affronter les périls de la vie.
20 - Parlons-en, comme si vous y connaissiez quelque-chose vous à la vie qu'on mène en dehors du white cube.
19 - Je sais vous cumulez Cosette David Copperfield Gervaise et vous êtes soutien de famille depuis l'âge de huit ans.
18 - Franchement monsieur vous pourriez être un peu plus compréhensif vous ne vous rendez pas compte des efforts fournis.
17 - Pour le fournisseur d'efforts vous feriez bien de changer d'adresse et exiger bons de commandes et factures.
16 - Cette conversation prend un tour bien singulier si vous me permettez je la trouve trop polyvalente.
15 - Totale improvisation, toute ressemblance avec des faits réels serait fâcheuse coïncidence, remboursement immédiat sur demande.
14 - On le fera savoir soyez sans crainte, vous nous avez donc emmenés en bateau.
13 - Ce ne sera pas nécessaire, ni avion ni train non plus, aucune réservation.
12 - Il se trouve donc par chance que c'est à moi de dire ...
11 - Stop. Vous avez prononcé un bel alexandrin, magnifique pour le blog.
10 - On dirait que vous ne savez plus bien quoi dire.
9 - C'est toujours un peu mon problème, chercher mes mots.
8 - Compter vous voulez dire, ce serait plus approprié.
7 - C'est Buñuel ce soir je crois bien.
6 - Lisez l'affiche, c'est en toutes lettres.
5 - J'aimerais tellement revoir L'Ange Exterminateur.
4 - Ils sont tous enfermés.
3 - Personne ne sort.
2 - C'est ça.
1 - Ouf !

Stéphanie Moreau

Scène première : deux personnages, debout, face au public.

Oh !
Dis-je
C’est beau !
Oui, je trouve aussi.
C’est esthétiquement qualifiable de beau
Oui, mais beau comme quoi, hein ?
Beau comme la rencontre d’un parapluie
Et d’une machine a coudre sur une
Table d’opération, oui, je sais, c’est banal.
Beau comme un coucher d’soleil sur la mer bleue
Oui, bah là, tu fais pas mieux que moi !
Non, désolé, l’inspiration ne me vient pas
Comment qualifier le beau pour le comprendre ?
Bof, cherche pas, pas la peine
Ça me semble pourtant important
Le fond du problème
Est pas là
Tu penses ?
Oui

Seconde scène : les deux personnages sont assis sur des fauteuils rouges.

Je…
Quoi encore ?
J’ai euh…
Quoi ? T’as quoi ?
Euh bah j’ai euh….
Qu’est ce qui se passe ?
Eh ben euh ben je euh je….
Mais quoi? Quoi? Ben euh…dis le quoi!
Bah c’est que je euh je je je …
T’as quoi ? T’as quoi ? T’as quoi ? Hein ?
Bah je euh je que c’est euh je
Ah ! qu’est ce que tu as alors ?
Ben euh bah je euh je ben
Tu m’agaces à la fin!
Ben je sais pas euh
Bah dis moi ! Grrrr
J’ai faim
Juste ça ?
Oui

Scène troisième : Un premier personnage est assis de travers sur un fauteuil rouge. Le second se tient debout derrière lui, une carafe d’eau sur la tête.

Ah !
Ça rafraîchit !
De quoi donc ?
Une carafe d’eau
Ah oui, un bon verre
Sert m’en un silteplaît
Mais j’ai pas de verre, là
Pourquoi as-tu dis alors que ça rafraîchit ?
Bah je dis ça parce que c’est vrai
L’eau fraîche, ça rafraîchit, c’est logique tu vois
Oui, mais si tu n’as pas de verre
Je ne vois pas pourquoi tu dis ça
Pas de verre, non, mais une carafe.
Une carafe ? ah oui ???? et où ?
Là, sur ma petite tête
Tu veux voir ?
Non merci
« Plouf »

Scène dernière : les deux personnages sont assis dans leurs fauteuils rouges

Dommage
Quoi dommage ?
Je l’aimais
Tu aimais quoi, dis ?
Ce costume bleu sur moi
Et tu ne l’aimes plus ?
Je l’aime moins maintenant sur moi
Et pourquoi maintenant tu ne l’aimes plus ?
Je ne l’aime pas plus, je l’aime moins
Et pourquoi tu l’aimes moins que pas plus, hein ?
Je ne l’aime pas plus, je l’aime moins
Moins ou pas plus, je vois pas là !
Je l’aime moins, pas pas plus
Ah ! j’ai compris, juste moins
Je l’aime moins, juste
Ni plus ni moins ?
Plus ou moins
Tu comprends ?
Oui



Il pleut
Il
Pleut sur
Moi ici dehors
J’ai froid sous
Cette pluie là, ici, moi
Je ne sais pas pourquoi ici
J’ai froid sous cette pluie là
J’ai rarement froid sous la pluie moi
Sauf ici, ici j’ai froid sous la pluie
Je ne sais pas pourquoi je reste sous cette pluie
Je pourrais rentrer au chaud dedans à l’intérieur
Mais quand il pleut, la pluie me mouille
Et même si ça me donne froid
J’aime bien être mouillée, moi
La pluie mouillée est froide
Mais la pluie mouille
Et j’aime
Etre mouillée
Moi !

Shan Huang

la pièce
devient toute noire
le courant est coupé
mon oeil ne sait plus
j'ai pas fermé mes yeux
mais je vois quand je les ferme
je dors avec les yeux ouverts
je rêve des fleurs
je les vois
dans balcon
fleurs



eau
parfois froid
comme un miroir
c'est aussi une énergie
elle peut inonder des pays
lorsqu'elle rencontre un feu aricle
les deux se consument et deviennent fumée
lorsqu'il rencontre une eau dévastatrice
il peut brûler des forêts
c'est aussi une énergie
comme une lumière
parfois brûlant
feu

Marine Pasquet

_ « salut ! »
_ « Ça va? »
_ « Ouais, ça va. »
_ « Mais ça va comment? »
_ « Ben ça va plutôt bien.»
_ « Rien d'autre à me dire, donc ? »
_ « Non, rien d'autre à TE dire en fait. »
_ « Bon... Sinon tu as eu des nouvelles? »
_ « Non, j'ai pas eu de nouvelles de lui depuis. »
_ « Ah, bon... Très bien, mais alors depuis tout ce temps ? »
_ « Ben rien, je t'avais dis qu'il n'était pas du genre loquace. »
_ « M'ouais, enfin ça ne se fait pas d'agir ainsi, tu trouves pas? »
_ « Si, je trouve... Bon tu as quelques chose à me demander ou quoi? »
_ « Non, je t'appelais juste comme ça, pour savoir si ça allait. Tout simplement. »
_ « Hum... Ben ça va bien. Et toi alors, quoi de neuf dans ta nouvelle vie ? »
_ « Ben ça va. C'est cool. Ça change mais toi t'es sûre que ça va? »
_ « Écoute, si je te dis que tout va bien, c'est que tout va bien, arrête avec ça!
_ « OK, OK j'arrête. Parlons d'autre chose alors. Tu m'a l'air d'être de mauvaise humeur. »
_ « Je ne suis pas de mauvaise humeur, c'est toi qui m'énerves à toujours croire que... »
_ « Croire quoi ? Je ne crois rien du tout, je trouve juste qu'à ta place... »
_ « Tu n'es pas à ma place et je vais très bien, merci ! »
_ « Cool, super, bien, vraiment très bien, je suis content pour toi. »
_ « Voilà. Je vais bien. Et rien d'autre à me raconter sinon ? »
_ « Ben non, tout va bien je te dis pour moi. »
_ « Bon ben OK, sympa d'avoir appelé, alors à bientôt. »
_ « Ouais, à bientôt. Je peux t'appeler quand? »
_ « Pour ce qu'on a à se dire! »
_ « Hum... Ouais je sais, mais bon. »
_ « Appelle la semaine prochaine alors? »
_ « OK, lundi ça va? »
_ « Oui c'est bon. »
_ « A plus. »
_ « Ciao. »

Pauline Abbadie

Bleu
Bleu Klein
Bulbe blizzard bleu
Brassard à brique bien brancardé, Dan
Débranchement méchamment marqué en méthode champenoise
Pignons pour poivre mignonnette minimisée par un macaron macramé
d'un mignonne allons donc louer l'aube morose qui ce matin avait éclose
L'image gicla juxtaposant Gibraltar jusqu'à Johannesburg j'imagine
N'est-ce-pas qu'il n'est pas aisé l'exercice imposé
bien boosté bougre graine de guignol
lorgne donc au lieu de palabrer
magique manière gambergeante
ganache magnifique
Magenta

Alexis Judic

Discussion entre deux gars du bâtiment, l’un plus expérimenté que l’autre.

Oh
Oh oui
Oh oui encore
Oh oui c bon ça
Ouais ouais je le tiens là
Oh oui tu le tiens vas-y
Aller enfonce enfonce tu y es presque
Ouais je le sens waou c’est bien dur
Bah oui tu croyais quoi quand je le fais
Oh oui tu le fais bien rien à redire
Ouais ce n’était pas si dur que ça
Ouais mais je voyais le mur plus épais
Tu sais moi les murs j’connais
Ça c sur tu es doué
Eh 5 ans d’ expérience
Ah oui quand même
Oh bah t’ sais
Quand même
Bah

Maison
Non, immeuble
Toiture en ardoise
Non, surface en béton
Toit en pente, crépi jaune
Non, immense block gris, façon HLM
Ouvertures, fenêtres, portes, quelque chose de lumineux ?
Surfaces lisses, bow-window et balcons
Terrasse, jardin, pelouse et balançoire
6 étages, parking souterrain
Chambre plein sud
Cuisine américaine
Pavillon

Rose Mansion

Mange.
-Veux-pas.
-Tu vas manger.
-Je n’ai pas faim.
-Tu vas manger quand même.
-Et puis d’ailleurs c’est quoi ça ?
-Ca c’est le futur contenu de ton estomac.
-C’est ça et il y a quoi dedans ?
-Du bon camembert du caramel et des fruits secs.
-Force-moi et tu pourras dire adieu à ta moquette.
-Tu doutes de mes talents de cuisinière ? Goûte avant de critiquer.
-Tant que ça n’est pas moi qui paye la note du nettoyage…
-Petit malin…, coupe-toi une part et dis-moi ce que tu en penses.
-C’est euh, comment dire… Vraiment, euh… Délicieux.
-Tu te fiches de moi ? Si tu n’aimes pas,tu n’avais qu’à pas goûter.
-Mes dents s’en seraient bien mieux portées, sur ce point je suis vraiment sincère.
-Cesse, tu n’as jamais été prompt à complimenter mes plats de toute façon.
-Les couteaux sont trop prompts à laisser leurs pauvres lames brisées dedans.
-C’est un peu compact c’est vrai mais au moins c’est nourrissant.
-Est-ce que la notion de plaisir gastronomique te parle ?
-Pas plus que toi le lundi matin.
-Très drôle, n’empêche, ça reste bizarre comme recette.
-Non, c’est original, tu m’entends!
-Je me sens tout drôle…
-Arête, ça va, j'ai compris.
-Je ne plaisante pas.
-Moi non plus.
-Ma moquette!
-Désolé.

Agnès Calu

Marine Lévêque

quoi ?
quoi, quoi ?
t'as dis quoi ?
quand j'ai dit quoi ?
tu as dis quoi avant
avant quand, j'ai rien dit moi
tu m'as parlé, je t'ai vu arrête!
calmez-vous msr, et je vous assure que...
Oh! j'te dis que tu m'as parlé alors dis
mais dire quoi, je n'ai rien dit ça suffit hein!
vous avez marmonné un truc, j'l'ai bien entendu, j'suis pas sourd
j'étais à côté de la fenêtre, je regardais les paysages passer je....
il faut pas croire qu'avec mes écouteurs j'entends rien, j'ai des yeux aussi
c'est ridicule monsieur ! Je n'ai pas ouvert la bouche depuis le départ du train
tu crois que parce que tu as une cravate tu peux dire tout haut c'que..
ceci n'est pas une cravate ! C'est un foulard, terminons cette discussion absurde qui n'en finit pas
tu me parles de discussion absurde ? alors que tu me baratines depuis une heure avec ta cravate
un foulard, monsieur, laissez-moi au moins ça, j'y tiens c'est ma mère adorée qui me l'as offert
un foulard, d'accord un foulard, allez maintenant dis-moi ce que t'as dis avant qu'on aille s'expliquer dehors
écoutez je n'ai pas ouvert la bouche, ni regardé de ce côté-ci, laissez-moi reprendre ma contemplation du paysage
d'accord ! j'ai compris ! c'est un jeu ! là t'es en train de faire un jeu avec moi, mais moi j'le sais pas ?
heu... non pas vraiment, enfin si mais je ne suis pas sûr que vous soyez en mesure de comprendre, mais bon essayons !
j'ai remarqué ton petit jeu... tu joues à celui qui aura le dernier mot, c'est ça ? tu vas perdre à ce p'tit jeu ...
sans vous vexer je ne crois pas, car votre billet va jusqu'à Chartres et le mien jusqu'à Paris, vous serez parti et je gagnerai
sauf si ! dans ma ruse, ma grâce, je décide de descendre maintenant, vous vous retrouvez alors coincé dans un cycle décroissant incontrôlable.
tout juste, mais j'espère simplement que vos calculs sont bon, et que vous n'allez pas vous mordre lamentablement les doigts de cette...
je vous coupe, pardonnez-moi mais vous alliez rompre la règle et ceci je ne peux le tolérer, c'est interdit ça !
effectivement, je me dois de suivre l'ordre, mais je m'étais trompé dans mes calculs, cela me disqualifie-t-il ou pas ?
non, j'accepte cette erreur de débutant mais attention monsieur, attention, nous en sommes à 19 mots, il faut combler
oui, je suis un peu à court je l'avoue, mais à propos la discussion peut-elle être absolument absurde ?
oui, entièrement, autant que le fait que vous appeliez votre cravate un foulard, ce qui est absurde
je provoquais, pardonnez-moi, j'ai souvent pas le truc pour rentrer en contact avec les gens
j'ai remarqué, vous parlez puis, niez vos paroles, tout ça pour un jeu, c'est fou !
oui, je suis fanatique de ce genre de jeu, j'en fais tout l'temps avec....
CHUT ! vous avez vu comme vous ne faites pas attention à votre quota !
navré, et dire que j'y jouais tout le temps avec ma Bénédicte
ça fait longtemps que vous ne vous êtes pas entraîné alors
oui, depuis au moins six mois, quand elle est morte
toutes mes condoléances, j'excuse vos erreurs, après un enterrement
C'était horrible ! horrible, horrible, horrible, horrible, croyez-moi
non ! N'abusez pas! sinon j'arrête de jouer
ça passe bien avec des gens
les règles c'est les règles
Plus que trois fois
qui va gagner ?
je meurs
Perdu !

Patrick Gaïaudo

Louise Devin

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