Un groupe de personnes qui se réunissent un jeudi sur deux pour écrire

lundi 21 novembre 2011

Le violoniste et le coiffeur

Hans Simoni était un violoniste qui contre toute attente détestait la musique. Il ne supportait pas, il la haïssait sans commune mesure. Pourtant Hans avait un violon et comme par hasard il était doué dans ce domaine, donc il en faisait. Contrairement à ce qu'on pourrait croire personne ne l'avait jamais forcé à s'y mettre, pas ses parents ni quiconque. C'est ce foutu hasard qui lui avait mis dans les mains ce violon et au-delà de toutes les prévisions il réussissait à trouver les notes justes et le rythme parfait.


Vous n'êtes pas sans savoir que la vie peut paraitre injuste, et la vie était injuste pour Romuald, le coiffeur de Hans. En effet, ce coiffeur adorait la musique envers et contre tout mais n'avait aucune facilité dans la maîtrise de celle-ci. Il s'y était essayé, avait travaillé dur, sans relâche, il avait dépassé toutes les bornes imaginables, allant jusqu'à prendre en otage un professeur de musique renommé en exigeant de lui qu'il lui apprenne toutes les recettes pour devenir un bon musicien. Cependant, malgré tout ses efforts, parfois inconsidérés, il n'arrivait à rien.


Comme beaucoup de coiffeurs, Romuald était bavard et il aimait raconter sa vie à ses clients. Il avait donc raconté son histoire à Hans et celui-ci s'était abstenu de raconter la sienne, car il ne faudrait pas oublier ce détail : un coiffeur tient deux lames très coupantes au-dessus de votre tête, il ne faut donc jamais contrarier son coiffeur.


En revanche, alors que Romuald racontait pour la énième fois son drame musical, Hans lui avait lancé « Moi le violon ça me scie les nerfs ». Celui-ci avait senti à ce moment-là comme un refroidissement de la lame du ciseau et les cheveux du bas de sa nuque s'étaient hérissés. Quand le coiffeur demanda pourquoi il détestait le violon, Hans raconta son histoire du début à la fin, sans omettre aucun détail et en toute honnêteté.


Cette aventure coupa le souffle du coiffeur et après un moment glacial qui eu l'air de durer des heures pour Hans, Romuald partit furieux en jurant et en s'arrachant les cheveux.


Un violoniste avait fait vibrer la corde sensible d'un coiffeur avec son histoire tirée par les cheveux.


Mathieu Laffargue


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